Accessoires en toile de Jouy : retour sur une étoffe iconique

Pour cet article de blog, je vous propose de faire un léger pas de côté. Plutôt que de l’histoire de mots (quoique…), c’est d’un moment d’histoire tout court que je vais vous parler : celui de la guerre qui a fait rage, pendant une petite centaine d’années (1686-1759), entre les indienneurs d’un côté, et les lainiers et soyeux de l’autre…

Un indienneur, qu’est-ce que c’est?

Bon, OK, on va quand même faire un petit point de terminologie…

Dans le milieu du textile, une indienne est une toile de coton peinte ou imprimée qui, à l’origine, se fabriquait aux Indes. En tant que nom et dans ce sens précis, le mot est attesté en 1632. En somme, une indienne, c’est une toile de coton à motifs imprimés, comme votre charmant chemisier. Du mot sont dérivés indienneur, qui désigne la personne qui imprime les indiennes ; indiennerie, pour la fabrication ou le commerce des indiennes ; quant à l’industrie elle-même d’une façon générale, il s’agit de l’indiennage. Je ne vous cache pas que ces dérivés sont d’usage très vieilli. L’archétype historique de l’indienne, c’est probablement la toile de Jouy, j’y reviendrai.

Les lainiers, c’est plus simple : ce sont les personnes qui vendent ou travaillent la laine.

Quant aux soyeux (ce mot-là me plaît beaucoup), ce sont, logiquement, les fabricants ou négociants de soieries.

La cotonnade imprimée en embuscade

Mais que s’est-il donc passé au 17e siècle ?

Eh bien, les Françaises et Français se sont pris de passion pour les cotonnades peintes et colorées venues d’Inde, utilisées en décoration (mobilier, tentures, tapisseries…) mais aussi pour les vêtements.

Les premières manufactures d’indiennes s’établissent ainsi en Angleterre (vers 1670) et aux Pays-Bas (1678). En France, cependant, les lainiers et les soyeux, inquiets du succès de cette technique textile concurrente, décident de faire pression sur Colbert, alors surintendant des bâtiments, arts et manufactures (la production textile est à cette époque la première industrie du royaume de France).

Le 26 octobre 1686, Colbert promulgue un édit de prohibition des toiles imprimées ou peintes : leur importation, leur fabrication et leur usage sont interdits. Exit, votre chemisier imprimé. Mais le goût pour les indiennes est irrésistible, les amendes n’y font rien, et la contrebande s’organise. Si bien qu’en 1759, l’indiennage est de nouveau autorisé.

Des accessoires en toile de Jouy

Pourquoi je vous raconte tout cela ?

Eh bien, j’en suis la première surprise, car ce sont des motifs a priori assez loin de mon univers, mais je confesse une fascination inattendue pour la toile de Jouy. Alors, j’ai décidé de décliner les mini-sacs et les étuis à lunettes dans ce tissu.

Mais je n’ai pas pu m’empêcher d’y glisser un brin de malice : j’ai donc associé la toile de Jouy au jean upcyclé, pour une rencontre entre hier et aujourd’hui. Quand le classique a rendez-vous avec l’audace…

Vous les retrouverez notamment dans les coffrets-cadeaux spécialement conçus à l’occasion de la Fête des Mères, n’hésitez pas à y jeter un œil !

Entrée en scène de la toile de Jouy

Le problème, c’est qu’en 73 ans, côté technique, la France a pris énormément de retard par rapport à ses concurrents européens. C’est à ce moment qu’entre en scène une personnalité qui va révolutionner l’industrie textile : Christophe-Philippe Oberkampf (1732-1815), avec sa fameuse fabrique de toile de Jouy. L’homme a la particularité d’associer expertise technique et sensibilité artistique – ce sera une des clés de son succès.

Dans les tonalités de bleu ou de rouge, plus rarement de vert et de gris, la toile de Jouy va ainsi s’imprimer durablement l’imaginaire collectif, et est toujours vivace aujourd’hui.

Sources

Encyclopédie Universalis
Le Grand Robert
Musée de l’impression sur étoffes

Copyrights

Toile de Jouy rouge: Wikimedia Commons / Manufacture Oberkampf (Jouy-en-Josas, Yvelines), fabricant
Oberkampf: Wikimedia Commons / Musée de la toile de Jouy
Autre image et texte ©La Boîte à zigzag

Christophe-Philippe Oberkampf